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Chirurgie des personnes transgenres : les patients satisfaits

Les personnes transgenres représentent environ 0,5 % de la population totale. Un certain nombre d’entre elles entament un parcours de transition hormonale et chirurgicale vers le genre souhaité. Les urologues sont le maillon incontournable de la prise en charge de ces patients.

« Une personne transgenre est une personne qui se trouve dans une situation d’incongruence de genre. Cette situation se définit par l’incompatibilité entre l’identité de genre qui est le genre ressenti par la personne et le genre attendu, basé sur le sexe assigné à la naissance », explique le Dr Lucas Freton, chirurgien urologue et andrologue au CHU de Rennes et spécialiste en chirurgie urogénitale de reconstruction. On oppose transgenre à cisgenre. Le cisgenre est l’individu qui est en conformité de genre (qui naît garçon et se ressent garçon, ou naît fille et se ressent fille). « Une personne qui se ressent homme mais qui est née fille est un homme trans. On va le genrer au masculin. Une personne qui se ressent femme et qui est née garçon est une femme trans. On va la genrer au féminin. Un homme trans veut être reconnu comme homme et une femme trans veut être reconnue comme femme », nous éclaire le Dr Freton. Les personnes concernées par cette incongruence de genre représentent 0,5 % de la population générale. Si l’on se réfère aux études réalisées, ce chiffre pourrait monter jusqu’à 3 % de la population. Il pourrait y avoir en France, entre 300 000 et 2 000 000 personnes transgenres.

Le parcours de transition

La chirurgie des personnes transgenres est un sujet de plus en plus actuel et c’est auprès des urologues que les patients trouvent une réponse adéquate à leur souhait de chirurgie d’affirmation de genre. « Interroger un urologue est fondamental pour recueillir de l’information cohérente, comprendre la technique chirurgicale et être adressé à un centre expert », explique le Dr Antoine Faix, chirurgien urologue et andrologue à Montpellier. « Cet accompagnement proactif du patient dans son parcours de transition améliore nettement le pronostic vital du fait d’une nette diminution du taux de suicide élevé dans cette population », précise quant à lui le Dr François-Xavier Madec, chirurgien urologue, andrologue et sexologue à l’hôpital Foch et membre du comité d’andrologie et de médecine sexuelle de l’AFU. D’après l’expert spécialisé en urologie et en reconstruction uro-génitale, la prise en charge médicale hormono-chirurgicale recueille un taux de satisfaction des patients de 90 % avec une atténuation certaine de la dysphorie de genre. Se sentant plus à l’aise dans leur corps, la qualité de vie des patients en ressort améliorée. Les regrets de transition sont extrêmement rares.

Une prise en charge pluridisciplinaire

Après 12 années d’un travail commun entre diverses spécialités médicales, associations scientifiques, de patients et de personnes trans, des recommandations internationales ont été éditées en septembre 2022. Ces recommandations orientent vers une prise en charge centrée sur l’individu. « Il n’existe pas de parcours type, mais il est centré sur la personne, fait remarquer le Dr Lucas Freton. Le cheminement vers la transition s’organise autour de multiples spécialités et expertises (endocrinologues, chirurgiens, orthophonistes, soins psychologiques et psychiatriques, soins dermatologiques, accompagnement à la transition sociale…) ». La transition peut passer par un traitement hormonal (testostérone pour les hommes trans, œstrogènes et anti-androgènes pour les femmes trans). La chirurgie n’arrive souvent qu’après ce premier parcours hormonal. Il n’y a aucune obligation médicale ou chirurgicale et chaque patient est libre de faire son choix. Le Dr Lucas Freton nous le confirme : « Si les patients optent pour chirurgie génitale d’affirmation de genre, nous les aidons à avoir un sexe plus congruent avec leur genre ».

La chirurgie génitale : M to F 

La chirurgie des femmes transgenres (Male to Female) nécessite une intervention qui se déroule en 5 étapes : ablation des organes génitaux masculins et de la peau du scrotum, création d’une cavité vaginale, transformation du pénis en clitoris et raccourcissement de l’urètre, construction de la cavité vaginale avec utilisation de la peau du pénis et celle du scrotum, création des petites et grandes lèvres. « Les résultats esthétiques sont bons avec un taux de satisfaction à 80 %, note le Dr François-Xavier Madec. En cas d’insatisfaction, des retouches secondaires peuvent être envisagées ». Les résultats fonctionnels sont également bons, notamment en termes de profondeur vaginale. Une fois le vagin cicatrisé, les rapports pénétrants sont possibles. La satisfaction sexuelle est élevée avec des patientes beaucoup plus à l’aise avec leurs organes génitaux (67 à 90 % des cas). « Pour les femmes qui le souhaitent, souvent ayant effectué une transition à un âge plus tardif, il est possible de bénéficier d’une vaginoplastie sans profondeur, simplement avec la création d’une vulve mais sans canal vaginal, ce qui simplifie la chirurgie », ajoute le Dr Madec. Le résultat cosmétique est identique.

Des techniques innovantes se développent avec l’utilisation du robot chirurgical, notamment en cas d’insuffisance de peau pénienne ou de sténose vaginale. Pour compléter la transition des femmes transgenres, la féminisation et la chirurgie du visage sont proposées, mais également la création d’une poitrine et le body contouring faisant intervenir d’autres chirurgiens spécialisés (orl, plasticien).

La chirurgie génitale : F to M

Les hommes transgenres (Female to Male) qui naissent dans un corps de femme vont habituellement, en premier lieu, demander une torsoplastie masculinisante. La mammectomie est complétée par un modelage du torse afin qu’il devienne plus masculin. Vient ensuite la chirurgie génitale. Si l’homme trans ne souhaite pas avoir d’enfant, il est possible de faire une hystérectomie associée à un salpingectomie et à une ovariectomie. Mais ce n’est pas une obligation. « L’hystérectomie est en revanche nécessaire si l’on souhaite fermer le vagin pour effectuer une périnéoplastie dans le cadre d’une métaïdoïoplastie ou d’une phalloplastie. Le principe technique de la métaïdoïoplastie est la création d’une petite verge en utilisant les éléments anatomiques du clitoris. La reconstruction du fourreau de la verge se fait avec la peau des petites lèvres », détaille le Dr Lucas Freton. C’est une chirurgie qui se réalise en une seule fois. 85 à 95 % des patients sont satisfaits ou très satisfaits du résultat. 77 à 100 % d’entre eux peuvent uriner debout. La métaïdoïoplastie répond aux attentes des personnes transgenres qui souhaitent essentiellement obtenir des organes génitaux qui leur correspondent mieux sans pour autant rechercher une sexualité pénétrative. 10 à 25 % des patients vont aller vers une phalloplastie secondaire plus complexe avec prothèse érectile gonflable. Le taux de satisfaction esthétique de cette chirurgie est de 70 % ; 75 % des patients peuvent uriner debout et 69 % des patients retrouvent des sensations érogènes. Malheureusement, la phalloplastie secondaire avec prothèse érectile s’accompagne d’un taux de complications plus important (88 % des cas) que pour la métaïdoïoplastie. Peu de spécialistes étant formés à cette chirurgie, les patients doivent s’adresser à des centres experts.

La transition des mineurs

Bien qu’il n’y ait pas de chirurgie génitale légalement autorisée chez les mineurs, toutes les études et recommandations conseillent une prise en charge pro-active de ces jeunes sur le plan pédopsychiatrique et endocrinologique. Les spécialistes accompagnent l’enfant ou l’adolescent, ses parents ainsi que la fratrie dans le questionnement de genre. D’un point de vue médical, dès que la puberté se met en route, elle est bloquée, nous explique le Dr Lucas Freton. « Le but étant de se donner du temps et que le mineur puisse appréhender toutes les implications d’un traitement hormonal, notamment sur la fertilité. Si vers l’âge de 16 ans environ, l’adolescent souhaite poursuivre dans sa transition, une hormonothérapie est mise en place afin que la puberté se fasse dans le bon genre et éviter des chirurgies réparatrices éventuelles ».

Vanessa Avrillon

12-06-2023

Crédit photo : AdobeStock_310189795

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